Nils Jacket Contre l'Agent X, le site officiel des Enquêtes de Nils Jacket

Paragraphe 767

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- Fais pas ça, gamin ! vous exhorte-t-il. Tu vas avoir des ennuis.

Vous venez de perdre la mémoire. Quel ennui pourriez-vous avoir de pire en tentant d'en apprendre un peu sur les faits advenus ici ? Vous ne savez rien de ce qu'il s'est passé au-delà d'un quart d'heure. Il serait imprudent de prendre une décision dans l'urgence de la situation sans savoir exactement quelle est cette situation. Vous vous cachez derrière une camionnette stationnée pour pouvoir observer la suite des événements. Dédé grommelle dans sa moustache mais, au lieu de mettre les voiles, il vient vous rejoindre dans votre cachette.

- Je croyais que rester ici attirait les ennuis, ironisez-vous.

- C'est clair...! Mais tu m'as l'air du genre suicidaire, je peux pas te laisser seul. Sans moi, tu vas vite te faire descendre. En Suisse, on plaisante pas avec les criminels.

- Tant que vous n'avez pas la preuve que je suis un criminel, je suis présumé innocent.

- Certes... Attendons que les choses te reviennent, on y verra plus clair.

Le regard fixé sur la porte de service du Chicago Ace, vous attendez que la police arrive.

- Ce bar, c'est celui de Vitto Vogel, une figure de la vie locale, explique le clochard. La police y fait des descentes de temps en temps car elle le soupçonne de diverses activités illégales : jeu, prostitution et drogue. Mais il n'a jamais été arrêté, à ma connaissance. Je ne sais pas ce que tu pouvais faire là-bas.

Vous non plus. Y étiez-vous juste pour boire un verre ? Les sirènes de police se rapprochent et vous voyez la lumière de leurs gyrophares éclairer le haut des immeubles voisins. Ils arrivent.

- Tu ferais bien de te débarrasser de ton flingue, vous dit alors Dédé à brûle-pourpoint.

- Mon pistolet ? Pourquoi ?

- Si t'as mis un silencieux dessus, j'ai peur que t'aies fait des bêtises avec...

Il veut dire par là que si vous avez commis un crime avec cette arme, c'est une preuve infaillible de votre culpabilité. Auquel cas, votre sauveur a raison : mieux vaut que vous vous en défaisiez au plus vite. Il vous suffit pour cela de jeter discrètement l'arme dans une bouche du caniveau (et de l'effacer de votre liste d'Objets). Ainsi, il faudra un certain temps avant qu'elle ne soit retrouvée. D'un autre côté, ce Browning, c'est votre seul moyen de vous défendre si vous veniez à retomber sur celui qui a fiché une balle dans votre crucifix. Il serait imprudent d'être désarmé.

En tous cas, vous trouvez que, pour un clochard, votre allié s'y connaît bien en dissimulation de preuves. La façon dont vous le regardez lui faire comprendre ce que vous êtes en train de vous dire. Gêné, il vous explique sur un ton penaud que, s'il se montre aussi méfiant, c'est qu'il a déjà eu maille à partir avec le commissaire Lamprey, le tyranneau qui dirige d'une main de fer les forces de police genevoises.

- Lorsqu'il est entré en fonction, il a annoncé qu'il allait mettre fin à toutes formes de pègre à Genève. Un sacerdoce louable dans le fond, mais dans la forme, il a mis tout le monde dans le même sac. Tu vas pas me dire que la mendicité est une activité illégale aussi grave que le trafic de drogue ! Je veux plus jamais avoir affaire à lui et je fais le nécessaire pour ça. C'est pour ça que je tiens pas à être pris en compagnie d'un gars armé qui clame être amnésique, tu comprends ?

Vous opinez. Le regard perdu, le clochard soupire :

- Ce Lamprey... un type dont faut se méfier.

Soudain, il s'interrompt.


Plusieurs voitures de police déboulent et freinent en trombe devant la porte de service du Chicago Ace. Des policiers en tenues d'assaut en sortent, armes à la main, se tenant prêts à tirer sur quiconque sortirait du bar. Certains scrutent les alentours ; vous reculez prestement, bousculant Dédé au passage, pour vous cacher derrière votre camionnette. Lorsque vous tendez la tête à nouveau, vous apercevez de dos un officier bien bâti qui aboie des ordres aux hommes présents. Il leur ordonne de pénétrer dans le Chicago Ace. Si vous y étiez entré, ils vous auraient cueilli sans coup férir.

- Ce grand gugusse, là-bas, c'est Lamprey, justement.

Vous baissez les yeux : c'est Dédé qui s'est mis à quatre pattes pour observer la scène sous votre épaule.

- Si Lamprey est là en personne, c'est que ça traque un gros gibier. J'ai jamais vu autant d'argousins au mètre carré ! Ils ont carrément fait appel aux hommes du COUGAR, la force d'intervention. J'espère que c'est pas toi qu'ils cherchent, sinon t'es mal barré !

Vous écarquillez les yeux pour mieux distinguer ce commissaire mais vous devez à reculer car le voilà qui s'approche, accompagné d'hommes en costumes. Sans savoir que vous vous trouvez là, il est venu de votre côté se mettre à l'écart, pour entretenir ses subalternes de l'assaut qu'il vient d'ordonner.

- Je veux que tout soit fini et que le périmètre soit sécurisé d'ici une heure, tonne Lamprey. Pas question qu'un journaliste ne sache ce qu'il s'est réellement passé, compris ?

- Bien, commissaire. Et que faisons-nous de ce détective étranger, ce Jacket ? C'est quand même son gouvernement qui nous a prévenus du forfait qui se préparait.

- Il reste où il est et il ne fait rien sans mon ordre. Il sera informé de nos résultats quand l'opération sera terminée.

- Mais... c'est son enquête, quand même.

- Sûrement pas, c'est MON enquête ! C'est MON arrestation ! Tout crime qui se déroule sur ma juridiction est de mon ressort, et certainement pas de celui d'un détective privé, fût-il mandé par un ministre ou je ne sais quoi !

- Dois-je dire à Gustave de descendre de son poste ? demande un autre inspecteur pour faire diversion et juguler l'ire de son supérieur.

- Pas tout de suite, je veux qu'il continue d'observer les environs.


Aussitôt qu'ils se sont éloignés, vous fouillez du regard les immeubles alentours. D'instinct, vous avisez une fenêtre à laquelle est penché un homme qui surveille attentivement les manoeuvres des policiers. Il ne regarde pas avec l'oeil curieux du simple badaud. Il y a du professionnalisme dans sa façon de scruter ce qu'il se passe. Cet homme est très certainement un inspecteur de police en planque, sans doute le "Gustave" qui vient d'être évoqué par les enquêteurs. Vous en avez l'intime conviction. Comment pouvez-vous en être si sûr ? Vous ne sauriez l'expliquer, mais vous savez que vous avez raison. Votre instinct ne trompe pas. A défaut de mémoire, c'est déjà une précieuse chose que vous avez gardée de votre patrimoine intérieur. Depuis quand est-il là à épier le Chicago Ace, et qu'a-t-il vu ? Il serait intéressant de le savoir, mais votre situation ne vous permet pas vraiment d'aller lui poser la question. Dédé, lui, ne tient plus. Il dit que c'est trop dangereux de rester ici plus longtemps. Des policiers vont sûrement venir de ce côté. Il vous enjoint de quitter les lieux sans attendre.


Si vous partez avec lui, suivez-le au 287.

Si vous partez, mais de votre côté, gagnez le 58.

Si vous préférez rester où vous êtes et continuer d'espionner la police, rendez-vous au 434.