Nils Jacket Contre l'Agent X, le site officiel des Enquêtes de Nils Jacket

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Horace Halade vivait dans une vaste propriété à la lisière de la ville : un grand manoir XIXème entouré d'un bon hectare de bois, le tout ceint par un grand mur garni de pointes.

Il avait plu toute la journée, mais cela n'avait pas découragé une foule de curieux massée devant le portail d'entrée, à l'affût de l'entrée en scène de leur héros voleur. Une fois passé ce rideau avec l'aide de la police, vous garâtes votre berline à côté d'une Rolls et d'une voiture de police. Cardoze et Châtaing étaient arrivés avant vous. Sitôt montée la volée de marches menant à la porte, vous fûtes accueilli par un vieux majordome en parfaite livrée qui vous conduisit auprès du maître de maison.

Horace Halade vous accueillit avec chaleur et bonhommie. Une tête de moins que vous, mais un fort embonpoint en plus, le magnat de l'industrie chimique se donnait visiblement une grande importance : vêtu d'un costume blanc tape-à-l'œil, il allait même jusqu'à porter le monocle. Quand il parlait avec sa voix flûtée, il lissait une moustache frisée très commedia dell'arte dans l'esprit, involontairement hélas pour lui. Vous lui donniez la cinquantaine.

Pendant que son âme damnée Damien Dépreaux discutait avec Cardoze et Châtaing, votre client vous présenta son épouse Angélique, une belle trentenaire fringante et déterminée. Exacte opposé de son mari, elle était habillée d'un tailleur classe et avait élégamment ramené ses cheveux blonds et frisés en chignon. Étonnant qu'une femme de son genre eût jeté son dévolu sur un personnage aussi grotesque que Halade... hormis pour l'argent, bien sûr.

En dehors d'Octave le majordome, le personnel de maison se résumait à une cuisinière rondelette et une jeune femme de chambre d'origine maghrébine.


- Voici la Nymphe Endormie ! vous désigna Halade.

Il s'agissait d'un nu somme toute assez classique, une jeune femme brune allongé sur le ventre sur un lit, le corps plus ou moins caché par les plis des draps blancs. Notarangeli avait dû le peindre de mémoire, car en prison il était difficile de trouver pareil modèle. Le tableau ornait le mur d'une petite bibliothèque meublée comme un salon, parmi d'autres toiles. Toiles de plus grande valeur, l'apprîtes-vous par la suite, via Internet sur votre smartphone. Un système de sécurité dernier cri équipait la pièce, avec alarme se déclenchant dès que le tableau serait retiré. La fenêtre était fermée de l'intérieur par un lourd volet de bois massif. Si le Voleur d'Ombres voulait entrer, il devrait passer par une porte.

- Le mieux est que nous restions dans cette salle, diagnostiqua Châtaing.

- Pas question !

Mme Halade avait employé un ton catégorique qui avait étonné son mari tout autant que vous.

- Horace, je t'ai déjà dit, cette partie de la maison est notre partie privée. Je ne veux pas d'étrangers par ici pendant que je circule en robe de chambre !

- Mais voyons, mon ange, c'est seulement pour cette nuit, tenta-t-il de l'amadouer. Ce cambrioleur est peut-être dangereux...!

Mais elle n'en démordit point. Sa véhémence vous surprenait. Quelle attitude étrange de ne pas vouloir sacrifier le quotidien face à une menace exceptionnelle ! Vous croisâtes alors le regard de la femme de chambre qui, elle, n'était pas surprise.


Le commissaire avait obtenu de Halade qu'il pût disposer des hommes dans les bois autour de la maison. Les curieux amassés aux grilles d'entrée de la propriété étaient un atout du voleur : ces policiers occupés par la foule, c'était ça de moins en surveillance dans la place.

Comme Mme Halade s'était retirée, son mari autorisa Châtaing à rester dans la maison, mais dans le salon. Lui et vous eûtes droit à des sandwichs préparés par la cuisinière : une soirée de veille vous attendait.


Rendez-vous au 50.